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En finir avec les grèves à répétition!

On ne compte plus le nombre de rencontres formelles et informelles, le nombre de débats télévisés, le nombre de marches et sit-in organisés, ici et là, ces trois derniers mois pour résoudre la crise qui secoue l’école publique au Bénin. Avec à chaque fois les mêmes acteurs et quelques autres, les syndicalistes d’un côté, les ministres responsables des ordres d’enseignement en plus du Premier ministre, coordonnateur en chef de toutes les négociations. Sans compter les multiples rencontres initiées par le chef de l’Etat, lui-même, au palais de la présidence avec tel ou tel acteur, à l’exclusion d’autres.

Tout cela sans succès apparent avec un gouvernement qui donne la fâcheuse impression d’être aux abois. La rencontre d’hier qui devait être celle de la dernière chance, pour avoir réuni pour la première fois aux côtés des protagonistes habituels, les élus locaux de tout le pays, les responsables religieux et les présidents d’institutions pendant plus de six heures d’horloge, a tourné en eau de boudin. Aujourd’hui, on est comme revenu à la case départ, chacun des protagonistes campant sur sa position initiale. Le gouvernement d’un côté affirme avoir déjà tout donné et les syndicalistes reconnaissant les avantages acquis exigent de l’employeur qu’il s’engage par écrit à leur accorder la fameuse prime d’incitation à la fonction enseignante. Conséquence: les écoles sont toujours fermées et le gouvernement multiplie les mises en garde et menaces de radiation. Alors, on fait quoi?

Nul ne peut répondre à cette question de manière satisfaisante, si on ne pose pas la question préjudicielle de savoir pourquoi toutes les tentatives de solution ont échoué. Pourquoi toutes ces réunions formelles ou informelles n’ont débouché sur rien. Et la réponse coule de source! La Méthode! Parce que le gouvernement s’y prend mal en matière de négociation avec les syndicalistes. Pourquoi ne pas laisser le Premier Ministre conduire les négociations jusqu’à leur terme, au lieu de les entrecouper d’interventions intempestives des ministres livrant les enseignants à la vindicte populaire au cours de débats télévisés à sens unique, tous frais payés et surtout, lors des tournées ministérielles dispendieuses. Pourquoi tous ces tapages, si c’est pour inviter les mêmes syndicalistes à la table des négociations quelques jours plus tard? Le président Yayi et son gouvernement ne devraient s’en prendre qu’à eux-mêmes, à leur méthode de négociation et de résolution des conflits sociaux. Yayi doit reconnaître qu’il est le seul responsable de la situation actuelle par son approche brouillonne de la question enseignante et sa propension au cours du premier quinquennat à vouloir tout donner en même temps dans le seul souci de rempiler en 2006. Exemple le reversement à caractère populiste, sans concours (en violation des textes) de plus de douze mille (12.000) enseignants dans la fonction publique. Exemple surtout de cette revalorisation de salaire de 25% étendue à tous les fonctionnaires. Aucun gouvernement, jusqu’alors, n’a osé prendre ni mettre en œuvre de telles mesures qui ne peuvent que mettre à mal l’équilibre budgétaire. L’augmentation exponentielle de la masse salariale que le gouvernement brandit aujourd’hui comme un épouvantail n’est pas imputable aux enseignants mais au gouvernement qui aurait dû savoir, comme aujourd’hui, jusqu’où il ne pouvait plus aller loin. Où étaient le Premier ministre et tous ces «ministres gueulards», lorsque leur champion prenait ces mesures populistes à caractère électoraliste de reversement d’enseignants et de relèvement de 25% à tous les fonctionnaires? Qui d’entre les ministres a pu dire au chef tout puissant «Monsieur, vous risquez de nous conduire dans le décor?

Alors, que faire? Sinon parler le langage de la vérité tout en assurant la bonne gestion des maigres ressources du pays. Car à tout prendre, le problème de la crise actuelle est simple. Au lieu de proférer des menaces, de recourir à des solutions radicales que tout le monde sait inapplicables parce que saugrenues et complètement irréalistes. On peut radier les vingt et quelque mille enseignants, mais on ne peut les remplacer tous par des chômeurs sans formation, sans risquer de mettre en péril tout le système éducatif et le pays à feu et à sang. Le gouvernement doit reprendre langue sans délai avec les syndicalistes. Ces deniers reconnaissent qu’ils ont perçu les fameux 25% de relèvement de salaire accordés à tous les autres travailleurs. Mais ils se disent avoir perdu la prime d’incitation à la fonction enseignante. Et ils ont raison! En comparant leur salaire à celui des magistrats qui bénéficient d’un statut particulier, et à celui de leurs collègues du supérieur (silencieux aujourd’hui, pour avoir vu leur salaire initial multiplié par quatre ou cinq, selon le rang), ils se sentent laissés pour compte. Or, les enseignants du secondaire et surtout ceux du primaire sont ceux-là même qui ont plus de charges horaires et qui travaillent dans des conditions, parfois infra humaines. Le gouvernement a le devoir de les rassurer en leur promettant dans un futur proche cette prime d’incitation dans le cadre d’un statut particulier à négocier avec l’Etat-employeur. C’est une question de volonté politique et il y va de la survie de notre système éducatif. Le gouvernement qui trouve des moyens d’offrir un train de vie hors de proportion aux fonctionnaires improductifs des bureaux cossus des ministères (voitures rutilantes et autres joyeusetés qu’offrent les fonctions administratives) et qui octroie de surcroît des salaires politiques hors norme aux hauts dignitaires séniles qui refusent de quitter la scène politique, doit pouvoir trouver de quoi payer des primes à «ces damnés de la terre» de notre société. Ces primes individuellement dépassent rarement la dizaine de milliers de francs pour la grande majorité. Ainsi en finira-t-on avec cette propension des enseignants à déclencher des grèves interminables qui laissent sur le carreau les enfants des pauvres. Ainsi, en finira–t-on surtout avec cette école à double vitesse où, seuls les enfants des quelques riches d’entre nous peuvent fréquenter les écoles privées qui ne connaissent jamais de débrayages.


Par Vincent Foly



14/03/2012
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