La fermeté du Président

Boni Yayi est enfin sorti de son silence pour évacuer le brouillard entretenu par les commérages sur le programme de vérification des importations et son précieux projet de la Refondation, pilier de son second mandat. La presse surexcitée par l’actualité du Pvi s’est laissé aller à cœur joie à quelques glissades sur des pressions de la mafia visant à contraindre le Chef de l’Etat au recul dans ses réformes au port. Yayi n’a pas pris le risque de céder encore de la place au doute. Les plus sceptiques ont été servis, confondus et mis en déroute.

"Je ne reculerai jamais" jure Boni Yayi. Cette seule formule a épuisé tout le débat sur l’avenir des réformes. Yayi II est définitivement né. Il a signé la mort de Yayi 1er, accusé d’être champion de la reculade, celui qui se rétractait sans répit. Nous sommes d’emblée en route pour la Refondation. Le président réélu par K.O a livré le champ lexical de la fermeté dans le speech de vérité tombé sur la République en panne de confiance. L’évidence se charge de recenser les ingrédients de détermination et de fermeté : " la réforme au port, c’est indispensable ", "je ferai tout pour que le dispositif profite au peuple béninois" ou encore " nous voulons égorger le Bénin, ça ne se fera jamais". On notera pour emprunter l’expression de Claude Favre Vaugelas " la fermeté de son courage et ses regards". Le docteur a de la fermeté dans les mains, une vertu au service de l’heureuse initiative. On peut maintenant quitter le champ de l’espoir aveugle et vain et faire valoir notre foi à cette Refondation.

Il ne manquait que des signes de bonne volonté de Yayi II pour rassurer la nation et dispenser la soif de l’adhésion massive. Le président ventilateur chanté et agité à une époque récente dans les moules électoralistes a connu une métamorphose impressionnante. Le délicat exercice de discours improvisé sur une réforme sensible comme celle du Pvi comporte des risques. Mais Yayi en confiance a évité le péril et dépoussiéré l’insalubre polémique. Son intervention véhicule en revanche une clarification et découpe avec le glaive du langage de vérité, les envolées de sauvetage du camp anti-réforme d’où sortent les fumées de la débandade et l’écho des lamentations. Yayi a sans doute ému les Béninois en révélant le scandale autour du coût des importations. Le fossé entre les chiffres aiguise l’exaspération. " Quatre milliards d’euros alors qu’on parle d’un milliard d’euros". Attention au vertige ! L’écart est affreux. Nous sommes sur le Mont Corruption. La tentation de prendre l’ascenseur du Pvi pour sortir de la situation périlleuse devient une sagesse. L’urgence est de faire profiter le bénéfice du coût des importations aux Béninois. Cette responsabilité revient à l’Etat qui a justement trouvé la géniale inspiration d’un dispositif de contrôle pour empêcher l’épanouissement de la pègre nationale. Yayi a proclamé sa mission : "je suis là pour le Bénin de Demain, je ne suis rien devant ce peuple". Le pic de la corruption dans la gestion des importations forgeait malheureusement pour la République cet avenir fantôme aux mains vides que craignait Victor Hugo dans les " Voix Intérieures ".

Pour ce second et dernier mandat, Yayi peut réinventer son mode de fonctionnement et afficher toutes les audaces dans ses réformes. Libéré des pressions politiques, et porté en triomphe par tout un peuple, il est dans les conditions idéales pour mener avec succès la bataille des réformes. L’espoir renaît puisque le Président a décidé de ne plus commettre le péché de la remise en cause systématique de ses propres décisions. "Je ne reculerai jamais", dit-il. Jamais ! Cette promesse revêt la forme d’un serment.

Avec ce Jamais, la refondation respire et déborde de souffle. Elle fait admirer sa santé. Le proverbe a beau apprendre qu’il ne faut pas dire " fontaine je ne boirai jamais de ton eau". Yayi II semble à un point de non retour avec le nouveau et sublime pari du Jamais. Tant mieux !

Ecrit par Sulpice Oscar GBAGUIDI